Par collectif

 

Il y a peu de temps, trois de mes disciples à l’Académie de Contremont ont découvert, alors qu’ils faisaient de la recherche documentaire dans une vieille cave humide où je les avais assignés, deux manuscrits à l’apparence très ancienne. Malgré les effets du temps que ces ouvrages ont subis, mes apprentis ont été en mesure de décoder les titres des deux précieux documents : Les sources de la magie et Le mystère des Sylvaneaux… À leur surprise, ils ont réalisé, tandis qu’ils lisaient les mystérieux manuscrits, qu’il s’agissait de récits historiques datant d’il y a plus de mille ans!

 

Rédigés sous la forme de contes par un auteur du nom de Joël Champetier, ces textes nous ont fourni des renseignements inestimables sur notre monde et sur son passé, dont on ne connaissait jusqu’à présent que peu de choses!

 

Mais quelle ne fut pas notre surprise lorsque nous avons aussi découvert, glissées entre certaines pages des livres, des notes manuscrites rendues presque invisibles par le temps! Notre hypothèse quant à leurs origines est qu’il s’agit d’authentiques commentaires de lecture, fruits de la réflexion de trois étudiants ayant eu à décrypter les textes anciens… Parfois étonnants, parfois sibyllins — mais qu’est donc la « fantasy »? Un « roman »? Un « ptérodactyle »? Et pourquoi parlent-ils de Contremont, monde qu’ils ont visiblement habité, comme s’il s’agissait d’un royaume imaginaire? —, leurs mots nous ont permis d’avoir un point de vue inédit sur le sens profond des Sources de la magie et du Mystère des Sylvaneaux. Nous les reproduisons donc ici le plus fidèlement possible, en suggérant les questions qui semblent avoir guidé leurs réflexions.

 

  1. Quelles sont vos impressions après cette première visite dans l’univers de Contremont?

 

Amalia

 

Pendant ma lecture du roman Le Mystère des Sylvaneaux de Joël Champetier, l’univers de Contremont, qui était bien entendu représenté par une carte géographique au début du roman, me faisait énormément penser à un univers médiéval, où les châteaux et les palais sont construits en pierre et dans lequel les habitants se déplacent à cheval. Cependant, même si, à première vue, l’ensemble semblait assez typique des mondes de la fantasy, les territoires de Contremont et ceux du Nord de la Mer Géante annonçaient plusieurs lieux à découvrir qui sortaient de l’ordinaire, au fur et à mesure que les personnages du roman s’aventuraient loin des territoires qui leur étaient familiers. Il y avait d’ailleurs d’autres citées, comme le Royaume de Trioriz et la grande ville de Priscantines, avec leurs propres traditions, lois et savoirs, bien différents de ceux de Contremont, qui me réussissaient immanquablement à me donner envie d’en découvrir davantage sur leurs habitants!

 

Sylvain

 

Lorsque j’ai ouvert le roman Le mystère des Sylvaneaux du romancier Joël Champetier pour plonger dans le monde fictif qu’il avait créé, le premier sentiment que j’ai ressenti a été celui de la curiosité. Une carte placée au début du livre me dévoilait la totalité des mystérieux territoires où allait se dérouler une histoire épique. Sur la carte, un continent, sur lequel figuraient des noms de villes, des représentations de chaînes de montagnes et de forêts, était bordé par une vaste mer du côté septentrional. Ainsi, avant même de commencer ma lecture, je suis demeuré longtemps sur la page de cette carte, m’imaginant les rues des villes de Contremont et de Trioriz, la dense et quasi impénétrable végétation de la Forêt des Sylvaneaux, les eaux troubles et mouvementées des Marais Marivoles, ainsi que les flots impitoyables de la mer Géante, dont la traversée devait assurément être un véritable exploit! À ma grande excitation, sur la carte figurait également une étroite bande de terre située au nord de la mer Géante; c’était la mystérieuse contrée des Sylvaneaux, que le titre évoquait…

 

Razvan

 

Les péripéties du roman Les Sources de la magie se déroulent dans les territoires au sud du royaume médiéval de Contremont. Géographiquement parlant, l’univers est assez simple. On y trouve un fleuve qui coule vers le sud et qui relie Contremont au royaume voisin de Besline, là où survient l’élément déclencheur de l’intrigue. De ce que j’en ai lu, le climat semble similaire au nôtre, et comme le territoire est couvert de forêts, de quelques collines et de zones au relief montagneux, de plaines partiellement cultivées et de cours d’eau. La majorité des habitants des régions sont humains, mais on y retrouve aussi quelques géants, des nains et des créatures volantes qui ressemblent à des ptérodactyles. Même si j’aurais préféré qu’on me donne davantage de détails sur le monde et que celui-ci présente un peu plus de diversité, j’ai aimé l’espèce de réconfort qui se ressentait à travers les descriptions des lieux; on se sent presque chez soi, à Contremont!

 

Crédit photo : Amalia Greve Danielsen

 

  1. Quel personnage avez-vous préféré côtoyer?

 

Sylvain

 

De tous les personnages, j’ai été le plus intrigué par celui de Diarmuid, une représentante du peuple des Sylvaneaux, qui demeure toutefois parmi les humains. Comme tous les gens de son peuple, Diarmuid possède un charisme bien particulier, marqué par son apparence physique délicate et la froideur naturelle de sa personnalité. Tout au long de l’histoire, j’ai plus d’une fois été frappé par la sensation de mystère qui plane autour d’elle et j’ai été avide d’en découvrir davantage sur ses mythiques compatriotes, nés de l’union de la terre et de l’eau.

 

Razvan

 

C’est le personnage de Petite-Caille, la fidèle chienne du protagoniste des Sources de la magie, le sorcier Ian Corybantier, que j’ai apprécié le plus. Elle est aussi sympathique que brave, et elle donne un air de légèreté et d’espièglerie au roman, chose que seule une petite créature comme elle saurait réussir à faire. Malgré sa petite taille et ses capacités réduites si on la compare à son maître magicien, elle suit témérairement son compagnon à travers sa quête et elle ne recule devant aucun des dangers qui tentent de lui barrer la route. En fait, je trouve que Petite-Caille est un personnage exemplaire que n’importe quel bon récit de fantasy se doit d’avoir, entre autres pour alléger la tension et surprendre le lecteur.

 

Amalia

 

Parmi les nombreux personnages que j’ai rencontrés pendant ma lecture, c’est Fafaro, une jeune femme Musaphe, qui m’a le plus interpellée. Elle est à mon avis l’un des personnages les plus courageux du roman : en plus d’offrir ses services de guide de la montagne aux protagonistes, elle n’hésite pas à laisser derrière elle ses points de repère pour partir à l’aventure. Débrouillarde, elle sait comment se défendre et survivre dans la nature sauvage; d’ailleurs, elle est experte dans le dépeçage du lapin, chose qu’elle accomplit sans broncher! Même si elle préfère de loin les pantalons aux robes, et ce même si elle vit dans un monde pseudo-médiéval, ça ne l’empêche pas de rêver à l’amour, comme bien des jeunes femmes… Bref, j’ai beaucoup aimé sa personnalité indépendante, qui savait demeurer humaine et réaliste.

 

Crédit photo : Mathieu Lauzon-Dicso

 

  1. Selon vous, y a-t-il un certain message véhiculé par ces livres?

 

Amalia

 

L’un des messages du roman qui m’a particulièrement captivée a à voir avec le traitement du thème du vieillissement, en parallèle avec celui du développement. En effet, chez les trois peuples qui habitent les terres de Contremont, il est souvent question de conflits entre les humains, qui visent une croissance rapide de leur démographie et de l’étendue de leurs territoires, et les peuples plus anciens comme les Aggs et les Sylvaneaux, qui donnent l’impression de se sentir dépassés et oubliés dans le sillage excessif des hommes. Devraient-ils céder leur place aux nouveaux peuples sans leur résister? Faudrait-il qu’ils se battent afin de respecter d’anciens pactes et des promesses presque oubliées? J’ai trouvé captivants les rapports entre les trois et, à force de suivre la situation, j’y ai vu quelque chose qui m’a un peu rappelé les « conflits » intergénérationnels qui peuvent avoir lieu dans la vraie vie, notamment lorsqu’il est question de l’avancement des technologies et comment cela sépare parfois les jeunes des plus vieux!

 

Razvan

 

Le premier mot qui me vient en tête en pensant à ce livre, c’est le mot « famille ». L’histoire elle-même commence lorsque Héran, le frère de Ian Corybantier, lui envoie sa fille Marion afin de pouvoir mieux préparer son plan de démocratisation du royaume de Besline, où il est l’intendant. Il s’imagine que son enfant sera plus en sécurité ainsi, loin des troubles qu’une telle révolution ne manquerait d’engendrer. L’élément déclencheur survient lorsque Marion disparait, et Ian et ses acolytes doivent se mettre à sa recherche. Le message que je retiens du livre, au-delà des aventures, est l’indestructibilité des liens familiaux, qu’ils soient biologiques ou non. Le roman montre que malgré tout, lorsqu’il y a un danger ou un grave problème à affronter, une famille peut rester unie et lutter pour défendre l’un de ses membres.

 

Sylvain

 

Joël Champetier a glissé un subtil message sur la cohabitation et la tolérance, en présentant dans son roman un monde que plusieurs races différentes se voient contraintes de partager entre elles. Ainsi, la dominance de la race humaine sur son monde n’y est plus un fait aussi sûr que ce qu’il est dans la vie réelle, alors que l’on constate que l’humanité, dans le monde de Contremont, est obligée de cohabiter avec les Sylvaneaux, qui sont eux-mêmes apparus bien avant les hommes et qui se considèrent de fait supérieurs à eux. Une guerre de pouvoir se joue également entre les humains de Contremont et le dernier représentant du peuple des Aggs, des géants qui se nourrissent de chair humaine et dont le règne est depuis longtemps révolu. Dans ce jeu de suprématie et d’ambition, les peuples de la terre sauront-ils apprendre à vivre en harmonie les uns avec les autres, aussi difficile cette harmonie semble-t-elle être atteignable?

 

Crédit photo : Amalia Greve Danielsen

 

Conclusion

 

À lire les deux manuscrits retrouvés et les quelques notes qu’ils contenaient, mes disciples et moi entrevoyons en quoi le passé trouble et lointain vers lequel ils nous amènent ne semble pas si différent du nôtre, finalement. Beaucoup d’autres mystères n’attendent toutefois qu’à être dévoilés, car en ce moment même, il me vient un mot d’un de mes élèves, selon lequel un autre document ancien, toujours au nom de Joël Champetier, vient tout juste d’être retrouvé, parmi les rouleaux et les codex qu’avait accumulés un collectionneur d’objets rares! Malheureusement, notre travail à l’académie nous occupe trop ces jours-ci, et nous avons besoin de votre aide pour que les clés de cet autre texte nous soient révélées! Je lance donc un appel à tous ceux et celles qui, pratiquant la profession d’historien de Contremont, sont en mesure de lire ce texte : faites-le et apprenez-en plus, vous aussi, sur le passé de notre pays!

 

Signé Merrond, historien du roi à l’Académie de Contremont

 

Texte d’Amalia Greve Danielsen, de Razvan Banica et de Sylvain Liu

 

Révision : Mathieu Lauzon-Dicso

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