Par Dorsa Afshin

 

Lorsqu’on dit « bandes dessinées », on a souvent tendance à immédiatement penser aux nombreuses collections dont on feuilletait les numéros avec grand plaisir alors qu’on était à l’école primaire, comme les Calvin et Hobbes ou les Marsupilami, dans mon cas. Plusieurs persistent d’ailleurs à n’associer cet art qu’aux jeunes enfants plutôt qu’aux adolescents ou aux adultes, ce qui m’apparaît comme une grossière erreur ! En effet, la BD est maintenant reconnue comme une discipline artistique sérieuse et complète autant par plusieurs spécialistes de la littérature que par ses amateurs, et les bons récits de science-fiction y sont heureusement très nombreux. Au Québec, où le neuvième art propose une production foisonnante, une série de bandes dessinées se démarque par son utilisation du thème scolaire : L’Académie des chasseurs de primes, du dessinateur et scénariste Benoît Godbout et des scénaristes Michel Lacombe et Yanick Champoux, un bon exemple de BD qui pulvérise la généralisation selon laquelle les bandes dessinées sont puériles. En effet, cette série vise un groupe d’âge qui va bien au-delà de 12 ans. En deux tomes (et demi) parus entre 2009 et 2011, tous publiés dans la défunte collection Rotor des Éditions Les 400 Coups, les auteurs nous proposent l’histoire d’un groupe de neuf jeunes adolescents, qui viennent d’être acceptés à l’Académie des chasseurs de primes (ACP), la meilleure école de la galaxie pour les futurs aventuriers de l’espace. Or, leur expérience à l’ACP n’est pas tout à fait habituelle, puisque de nombreux événements viennent successivement chambouler le cours de leur éducation, voire de l’univers !

Ne sachant pas trop à quoi m’attendre avant de commencer la lecture du premier des trois tomes de la série, j’ai rapidement compris que j’avais pris une bonne décision en m’embarquant dans les folles aventures des étudiants de l’ACP. L’un des aspects les plus frappants de la série est les illustrations de Godbout. Détaillées, aux traits vifs, elles nous assurent du réel talent de cet artiste et de son attention qu’il a portée aux détails dans chacun de ses dessins, que ce soit pour représenter une des étranges créatures qui peuplent l’univers de la série, comme les närs (une sorte de gentil petit extraterrestre qui tient des enseignes pour communiquer avec les personnages autant qu’avec les lecteurs), ou pour illustrer les paysages de la planète Voldsohmet, ses vastes territoires montueux recouverts d’une couche de glace et le majestueux château de la famille royale situé au sommet. De plus, dans le tome 2.5, intitulé En vacances !, les illustrations sont le fruit d’une collaboration de douze différents artistes, dont Yanick Paquette, Marie-Émilie Rowe et Olivier Migneron, que les créateurs de la série ont invités le temps d’un numéro. L’ensemble est réussi et nous permet d’admirer les différents styles des autres dessinateurs, qui, chacun à sa manière, arrivent à capturer diverses facettes de la personnalité des personnages.

Crédit photo : Dorsa Afshin

Cependant, les illustrations des trois tomes ne sont pas le seul aspect qui les rend si bons ; il y a aussi les personnages qui y comptent pour beaucoup. Même si Gaël Dragonspit est le personnage principal de la série, les huit autres étudiants de sa cohorte sont tous aussi développés que lui. D’ailleurs, tous les personnages, y compris les instructeurs de l’académie, sont décrits à la toute fin des albums dans la section « Banque de données », un petit bonus très agréable à consulter. Il est vrai que l’abondance des personnages rencontrés dès le début de l’histoire peut rendre la lecture des premières pages un peu déroutante, mais après avoir déposé le dernier tome de la série, je me suis sentie liée à chacun des étudiants et à leurs personnalités attachantes. Gaël l’impulsif, Rose la nonchalante, Cacendre la persévérante, tous sont différents les uns des autres, et tous ont réussi à conserver une place dans mon cœur de lectrice. J’ai apprécié l’oeuvre autant pour son côté artistique que littéraire. Ayant terminé les trois albums de la collection à une vitesse folle, j’espère une suite (et un nouvel éditeur) aux aventures palpitantes des neuf apprentis chasseurs de primes, quoiqu’il semble que le projet soit en train de prendre le chemin du cinéma d’animation 3D…