Par Ioana Popescu Crainic

 

Un matin tranquille durant mes vacances, en décembre, je me suis réveillée au son de la bouilloire qui sifflait et je suis descendue chercher mon petit-déjeuner. En mangeant, j’observais mon père qui était en train de boire son café matinal et de lire un livre qui semblait le captiver et dont je n’ai pas pensé à noter le titre… Puis, soudainement, une idée m’est venue : à moi aussi, il me fallait une nouvelle lecture. Mon père, que je sais être avide de science-fiction, est un conseiller sur qui je peux me fier, donc je lui ai demandé : « Papa, as-tu un roman à me recommander? » Il s’est arrêté en plein milieu d’une phrase, puis, sans hésiter, il m’a répondu; ses yeux s’illuminaient, tandis qu’il prononçait le titre de cette œuvre.

 

Il s’est alors levé pour aller chercher le livre dans sa bibliothèque et me l’a rapporté, sans même vouloir me donner plus de détails sur l’intrigue ni me faire de commentaires personnels. Bref, il me laissait découvrir l’univers du roman par moi-même. Et j’ose dire que ma vie en a été complètement chamboulée! Et à vrai dire, je suis une lectrice extrêmement exigeante : lorsque je commence un roman, s’il n’attire pas mon attention dès le départ, je suis normalement incapable d’avancer dans ma lecture si mon désintérêt du début m’amène à douter que je finirai par aimer le roman ou pas.

 

Heureusement, cette fois-là, je n’ai pas eu ce problème, car j’ai été subjuguée en un instant!

 

Lorsque je pense à la science-fiction, je pense à des mondes complexes et à une ambiance lourde, à des pages pleines de termes futuristes et de noms inconnus. Par contre, dans ce cas-ci, soit un roman qui fait assurément partie de la science-fiction, l’auteur se concentre davantage sur des détails en apparence futiles, comme l’importance primordiale de posséder une serviette de bain lors d’un voyage intergalactique. Si lire du space opera vous est familier, vous connaissez sans doute la trame narrative habituelle du genre : des aventures incroyables dans l’espace, qui enchainent les péripéties, à travers des conflits intergalactiques, le tout saupoudré de romance… Bon. Maintenant, prenez ce schéma, défaites-le, puis teintez ce qui en résulte d’humour ironique, d’exagérations sarcastiques, de comédie à l’anglaise, parfois virant vers l’humour noir, et vous obtiendrez un récit unique, intitulé :

 

[Roulement de tambour…]

 

The Hitchhiker’s Guide to the Galaxy ! Ou H2G2 pour les intimes.

 

Crédit photo : Ioana Popescu Crainic

 

Cette lecture légère d’environ 180 pages, par l’auteur britannique Douglas Adams, raconte l’histoire d’Arthur Dent, un Anglais, qui se réveille au son de camions et de pelles mécaniques devant sa maison. On s’apprête à la démolir, sans l’avoir averti, pour construire une voie de contournement. Lorsque Dent, abasourdi, demande des explications, l’homme responsable du chantier lui dit que les plans de construction sont affichés quelque part, soit au fond d’un classeur fermé à clé dans les toilettes d’un sous-sol dépourvu de lumière et qu’il pouvait consulter ce classeur s’il souhaitait interrompre ou modifier les opérations. Dent se positionne alors devant sa maison pour contrecarrer les travaux. Cependant, ses revendications sont rapidement empêchées par des bureaucrates extraterrestres qui sortent de nulle part et déclarent à tous qu’ils vont bientôt détruire la Terre entière pour construire une voie de contournement, intergalactique cette fois-ci. Une fois que les humains présents tentent de leur faire changer d’avis, les nouveaux venus les informent que les plans de construction étaient affichés depuis un moment le système solaire d’Alpha du Centaure, et qu’ils avaient pu consulter ces documents s’ils avaient souhaité interdire ces « travaux ». Or, quelques secondes avant que la Terre ne soit anéantie, Ford Prefect, un ami d’Arthur Dent, amène ce dernier dans son vaisseau spatial. Puis, ensemble, ils quittent les lieux pour parcourir la galaxie, dans le but d’écrire une nouvelle édition du guide de voyage The Hitchhiker’s Guide to the Galaxy. Rien de moins!

 

Initialement, cette histoire a d’abord fait l’objet d’une comédie radiophonique, écrite par Adams et diffusée pour la première fois sur la chaîne de la BBC en 1978. Rapidement, l’univers déjanté créé par Adams a été adapté en romans, mais aussi en bandes dessinées, en une série télé, en un film et même en un jeu vidéo! Le premier tome (qui ouvre la trilogie, maintenant composée de… cinq livres!) est un classique satirique, qui est rapidement devenu un succès international, traduit en plus de 30 langues. Son humour demeure toutefois typiquement anglais, évoquant l’absurde et le style des Monty Python; je vous recommande d’ailleurs leur sketch « Ministry of Silly Walks », qui est à se tordre de rire!

 

La manière dont l’auteur réussit à intégrer les épreuves de la race humaine dans un monde imaginaire où elles s’entrelacent aux réalités quotidiennes d’extraterrestres loufoques vivant sur des planètes inconnues rend le roman très accessible, y compris à ceux qui ne lisent pas régulièrement de la science-fiction. Le sarcasme omniprésent détruit tous les clichés possibles des mauvais romans de science-fiction. Ce roman est donc un classique à la fois hilarant, intéressant et rapide à lire; bref, il est parfait pour un étudiant qui manque de temps libre, mais qui souhaite fuir un moment les ennuis du monde scolaire.

 

Crédit photo : Ioana Popescu Crainic

 

Alors, je vous conseille fortement de vous installer confortablement dans un café, de commander un latté glacé au thé vert (mon préféré!), de mettre de côté vos notes de cours, de plutôt ouvrir le roman de Douglas Adams et de vous laisser emporter par son univers extravagant. Cependant, si vous ne voulez pas avoir l’air fou, mettez-vous si possible dans un coin isolé : vous risquez de rire un peu trop fort et d’effrayer les étudiants autour de vous qui travaillent studieusement… Et sachez que, quelque part dans l’univers, je sentirai que vous aurez commencé The Hitchhiker’s Guide to the Galaxy et que, comme ceux de mon père il y a quelques mois, mes yeux se mettront à scintiller !

 

Révision : Hao Chen He et Mathieu Lauzon-Dicso